Le Nihonto ou Nipponto (日本刀), littéralement sabre japonais, se définit par un sabre forgé de façon traditionnelle au Japon. Souvent associé à tord au terme de katana, il en existe de nombreuses sortes, qui se nomment différemment en fonction de l’époque à laquelle ils ont été réalisés, ou encore du type de sabre ou de leur monture.
Nous allons aborder rapidement les principales différences de ces sabres, afin que les non-initiés puissent s'y retrouver plus facilement.
Tout d'abord, il convient de préciser que les nihonto sont divisés en 3 familles de tailles différentes. Les daito (大刀), sabres longs, sont les lames mesurant plus de 2 shaku, soit plus de 60,6 cm. Les shoto (小刀), sabres courts, sont les lames mesurant entre 1 et 2 shaku, soit entre 30,3 et 60,6 cm. Et les tanto (短刀), dagues et couteaux, sont les lames mesurant moins de 1 shaku, soit 30,3 cm.
Il y a plusieurs types de daito, comme les tachi, nodachi, ou les katana par exemple. Il existe également plusieurs types de shoto, comme les jintachi, kodachi, ou les wakizashi. Et il y a aussi plusieurs types de tanto, comme les shinogi, hira, moroha ou les katakiriha.
Le daisho (大小), littéralement grand petit, est une paire de sabres composée d'un daito et un shoto.
Il est aussi important de préciser que les techniques de forge ont beaucoup évoluées au cours de l'histoire du japon. L'histoire même du japon a déterminée les évolutions et changements de techniques et très nettement influencé l'art de la forge dans le pays.
Aussi nous allons énumérer les types de nihonto, en fonction des périodes auxquelles ils ont été produit. Il y eu chronologiquement d'abord la période jokoto, puis koto, ensuite shinto, suivit de shinshinto, après gendaito, pour finir avec shinsakuto.
Jokoto ou chokutō (直刀), littéralement ancien sabre, sont les premiers sabres forgés au japon, de l'an 645 à 900 environ. Ce sont des sabres à un tranchant ou partiellement deux, sans courbure. Le jokoto est inspiré de l'épée chinoise longue avec un pommeau en anneau, typique de la dynastie Han. Ils n’ont que rarement une trempe sélective comme les sabres moins anciens. Sur les plus belles pièces, la qualité de forge est comparable à ce qui fut réalisé plus tard.
En 984, le gouvernement proclama un décret interdisant le port du sabre aux personnes ordinaires sans un permis spécial. A noter que la lame est souvent en kissaki-moroha-zukuri (la pointe est à double tranchant, alors que vers la garde seul un tranchant est gardé).
Koto (古刀), fait référence également aux anciens sabres, forgés d'environ l'an 900 à 1596. Pendant cette période, les lames sont devenues des armes de tous les jours, et sont constamment portées par les samuraï. Les forgerons commencent à signer leurs œuvres au niveau de la soie (nakago). La partie proche de la garde (tsuba) ainsi que la poignée (tsuka) sont courbes, et les sabres ressemble à l'image qu'on se fait d'une lame japonaise aujourd'hui. C’est la période de fondation du Gokaden (五ヶ伝), les cinq traditions, classification des écoles de forge de nihonto :
- Yamato (Région actuelle : Nara)
- Yamashiro (Région actuelle : Kyoto)
- Bizen (Prefecture actuelle : Okayama)
- Soshu (Sagami, dans la région Kamakura)
- Mino (Seki, préfecture actuelle : Gifu)
Ces 5 styles ou écoles, resteront durant l'ère des koto l'un des moyens d'améliorer et faire perdurer l'art de la forge.
Après l’introduction, en 1543, par les portugais, du mousquet, plus de 300000 de ces armes furent réalisées dans les 10 ans suivant leur arrivée sur le sol japonais. L’arrivée de ces armes modifièrent les tactiques utilisées pendant les combats, donnant ainsi plus d’importance aux Yari (lance) et Naginata (hallebarde). Cela influencera aussi la forme des lames de sabres.
Shinto (新刀), littéralement sabre nouveau, forgés de l'an 1596 à environ 1800. Les forgerons ont commencé à organiser leur commerce de telle façon qu’il se situe dans la zone d’influence d’un seigneur de guerre, d’une chapelle religieuse ou d’un temple. De plus les accès ont pris leur importance, ils s’arrangeaient donc pour se positionner à proximité de routes commerciales, afin de se rapprocher à la fois des éventuels acheteurs et des fournisseurs de matières premières. Le système de transport national s’améliorant, ils profitaient aussi de ces évolutions.
À partir de cette période, les techniques de forge ont énormément évoluées. Les méthodes de production de l’acier se sont améliorées, à la fois pour augmenter la quantité, mais aussi pour homogénéiser la qualité. Les 5 traditions se sont mélangées, beaucoup de lame de qualités furent ainsi forgée. Pour plusieurs raisons, les shinto représentent aujourd'hui la grosse majorité des nihonto qui circulent environ 2 sabres sur 3.
Shinshinto (新新刀), sabre nouveau nouveau, forgés d'environ 1800 à 1867. Le système féodal et le prestige des samuraï baissent pendant cette ère suite à la modernisation du pays. Une caractéristique de cette ère est que les forgerons ne se cantonnent plus à une seule tradition, mais tentent de les mêler. La production de tanto qui avait diminuée reprend, et Edo va devenir le centre de production des sabres pendant cette ère. Beaucoup de forgerons ont adoptés les aciers Européens (Allemandes et Portugaises notamment) appelé nanbantetsu ou hyotantetsu ou konohatetsu, suite aux échanges avec les pays occidentaux.
De nombreuses lames ne sont plus produites qu'à des fins esthétiques ou décoratives, et de moins en moins de sabres furent forgés pour le combat. Pour diverses raisons, il reste aussi beaucoup de shinshinto comparativement avec les autres périodes. On peut estimer qu'environ 3 nihonto sur 4 sont shinto ou shinshinto aujourd'hui.
Gendaito (現代刀), ou sabre moderne, produits de l'an 1867 à 1945. La forge de sabre commence à être considéré comme un art, et les sabres sont recherchés pour l’esthétique. En 1871, le gouvernement créé le département des antiquités et de leur conservation. Le port des sabres fut interdit, en 1876, avec le décret Haitorei. La demande en sabre déclina alors très rapidement. Les forgerons perdirent leur prestige et furent obligés de diversifier leurs fabrications (ciseaux, couteaux etc..) pour subvenir à leurs besoins. En 1890, l’empereur créa le titre de Teishintsu Gigei, qui avec le temps deviendra le titre de trésor national vivant. Ce titre servira à encourager les artisans et préserver les compétences traditionnelles artistiques du Japon. Ce titre sera rapidement considéré comme le plus grand honneur fait à un artisan. En 1897, le système de nomination des sabres comme trésors nationaux débute, pour les lames détenues par les temples et les chapelles. En 1933, ce système est étendu à toutes les collections.
Tout ceci évitera le départ de plusieurs lames vers d’autre pays, ainsi que la disparition de l'art de forge des nihonto. Pendant cette ère, tous les sabres n'ont pas été fabriqué avec des procédés classiques (forge manuelle et trempe à l’eau), afin de répondre à la demande militaire. Deux types de sabres, réalisé à cette période, ne sont pas classifiés en tant que Nihonto :
- Murata-to : réalisé avec des machines, mais de bonne facture. Ils sont reconnaissables par le lustre réalisé sur les lames.
- Showa-to : aussi réalisé avec des machines, mais d’une piètre qualité, entre autre à cause de la mauvaise qualité de l’acier utilisé. Ils peuvent facilement être identifié par la présence d’un numéro de série et d’une fleur de cerisier gravé sur la soie de la lame.
Ces sabres militaires, ou gunto, furent parfois montés avec d'anciennes lames appartenant à la famille depuis des générations, et ne classent donc pas de la même manière.
Shinsakuto (新作刀), ou sabre contemporain, forgés après la fin de la prohibition de la manufacture des lames d’après guerre, depuis 1953. La forge est alors plus considérée comme un art que comme la création d’un outil. Les sabres japonais rejoignent ainsi les arts et métiers. Depuis 1955, un concours de forge est organisé chaque année à Tokyo. Il se nomme Shinsaku Meitoten. Les derniers maîtres forgerons contemporains produisent tous des sabres extraordinaires, qui bénéficient de toutes les améliorations techniques au fil du temps.
Il faut également souligner que leur travail étant reconnu comme de l'artisanat traditionnel, et qu'ils sont eux même des trésors nationaux vivant, la production de lames est longue et onéreuse. Beaucoup de lames sont donc de très bonne manufacture, et bon nombre de nihonto plus anciens furent rénovés et replacés dans des koshirae, c'est à dire des montures.
La loi sur la protection des biens culturels de 1950, a placé les fondements de la politique patrimoniale du Japon, qui depuis lors a classifié plus de 1000 trésors nationaux. Et il est maintenant interdit de sortir un sabre du pays classé kokuho, c'est à dire trésor national. Selon Christophe Marquet, plus de 120 nihonto sont répertoriés comme trésor national, dont près d'un tiers se trouvent à Tokyo.
Ce sont les grandes familles de sabre japonais, mais elles se divisent elles même en plusieurs sous familles.